Point de vue de la Cour de justice concernant la finalité des vacances annuelles en cas de maladie

Tomber malade n'est jamais agréable, mais pendant les vacances, c'est plus contrariant encore. Or ce n'est que si votre période de maladie prend cours avant le début de vos vacances que vous pourrez récupérer les jours de maladie qui coïncident avec vos jours de vacances. La Cour européenne de justice ne voit toutefois  pas les choses du même oeil. Dans un arrêt du 21 juin 2012, la Cour a en effet décidé que le travailleur qui tombe malade pendant ses vacances a le droit de prendre ces jours de vacances à une date ultérieure. Quelles sont les conséquences de cette décision pour la Belgique?

Tomber malade avant ou pendant la période de vacances

En Belgique, un contrat de travail ne peut être suspendu que pour une seule cause légale à la fois. C'est le premier motif de suspension qui l'emporte.

Le travailleur (ouvrier ou employé) qui tombe malade pendant ses vacances ne peut pas reporter à une date ultérieure les jours de vacances pendant lesquels il est malade. Dans ce cas, les vacances constituent en effet le motif de suspension initial du contrat de travail. Le travailleur perd dès lors ses jours de vacances, même s'il ne peut pas en profiter. Ces jours étant des jours de vacances, ils ne donnent pas droit à la rémunération garantie, pas même sur présentation d'un certificat médical. Pour ces jours, le travailleur ne perçoit que son pécule de vacances. Si au terme de sa période de vacances, le travailleur est toujours en incapacité de travail, il a droit, pour les jours de maladie qui suivent son dernier jour de vacances, à la rémunération garantie ou au solde éventuel des 30 jours civils à partir du début de l'incapacité de travail.

Quant au travailleur qui tombe malade avant son premier jour de vacances, il conserve son droit aux vacances et peut reporter les jours de vacances pendant lesquels il est malade. Le cas échéant, le premier motif de suspension du contrat de travail est la maladie. Le travailleur ne perd donc pas les jours de congé qu'il avait planifiés. En principe, ces jours doivent toutefois être pris avant le 31 décembre.
En ce qui concerne la rémunération garantie, une distinction doit être opérée entre les ouvriers et les employés. L'ouvrier qui tombe malade juste avant une période de fermeture collective ne percevra pas de rémunération garantie pour les jours de vacances collectives pendant lesquels il est malade. Ces jours seront à charge de la mutualité. En ce qui concerne les employés, l'employeur devra payer la rémunération garantie pour les jours d'incapacité de travail.

Arrêt de la Cour de justice

La Cour européenne de justice a décidé dans un arrêt du 21 juin 2012 (C-78/11 ANGED) qu'un travailleur qui tombe malade pendant ses vacances doit avoir le droit de prendre ces jours "perdus" à une date ultérieure. Par le passé, la Cour s'était déjà prononcée en ce sens  (voir l'affaire C-350/06 Schulz du 20 janvier 2009 et l'affaire  C-277/08 Pereda du 10 septembre 2009). La finalité des vacances diffère en effet de celle du congé de maladie :

le congé de maladie sert exclusivement au rétablissement du travailleur, ce qui lui permettra de reprendre le travail;

quant aux vacances, elles doivent permettre au travailleur de se reposer et de disposer d'une période de détente et de loisirs.

Conséquences pour la Belgique

L'arrêt de la Cour de justice fait suite à une question préjudicielle d'un juge espagnol. Un arrêt relatif à l'interprétation de la législation européenne est toutefois obligatoire pour tous les États membres de l'Union européenne. Lorsqu'une réglementation nationale est contraire aux règles européennes, le droit national doit être adapté sous peine de condamnation de l'Europe. Nous n'en sommes pas encore là. Les travailleurs peuvent déjà renvoyer à cette jurisprudence, mais pour l'instant, la règle selon laquelle la première suspension prime reste applicable. Les employeurs ne doivent donc pas (encore) paniquer. La ministre fédérale de l'emploi, Monica De Coninck, craint toutefois les problèmes pratiques lorsqu'il s'agira d'adapter la réglementation belge. Les travailleurs sont légalement tenus d'avertir immédiatement leur employeur en cas d'incapacité de travail. "Immédiatement" signifie le jour où le travailleur tombe malade et ce, même s'il est à l'étranger. Or il semble difficilement concevable, par exemple, d'envoyer un médecin contrôleur lorsque le travailleur est en vacances à l'étranger.